Comment entretenir une pelouse en période de sécheresse dans le sud de la France ?
C’est en marchant un matin sur l’herbe grillée dans un jardin varois, les semelles frottant un sol plus dur que la pierre, que nous avons pris la mesure de la sécheresse. Pas un brin d’ombre, pas une goutte d’eau depuis des semaines. La pelouse, autrefois souple et dense, craque sous les pieds. Il est alors tentant de baisser les bras. Pourtant, avec quelques gestes réfléchis, il est tout à fait possible de maintenir un tapis végétal vivant, même sous le soleil implacable du sud.
Comprendre la nature d’une pelouse
Chaque terrain est unique. Certaines pelouses sont un mélange rustique de graminées locales, d’autres ont été semées avec des variétés plus fragiles, gourmandes en eau. Dans le Midi, où les températures flirtent souvent avec les 35°C dès juin, il vaut mieux composer avec les herbes les plus sobres, comme le kikuyu ou le cynodon dactylon, deux espèces qui savent se passer de longues douches quotidiennes.
Observer sa pelouse en début de saison permet de détecter les zones les plus exposées, celles qui jaunissent les premières, ou les creux qui s’assèchent mal et se transforment en croûte. Cette cartographie sensorielle du jardin est précieuse pour anticiper et adapter nos soins.
L’arrosage : rare, mais décisif
Contrairement aux idées reçues, arroser fréquemment n’est pas une bonne idée. Cela encourage les racines à rester en surface, là où le sol sèche le plus vite. En période de sécheresse, nous préférons espacer les arrosages, mais les rendre plus profonds. Tôt le matin ou tard le soir, l’eau descend jusqu’aux racines profondes et ne s’évapore pas aussitôt.
Voici quelques principes simples pour arroser intelligemment :
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Privilégier un arrosage copieux une à deux fois par semaine plutôt que de petites quantités tous les jours.
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Utiliser un arroseur oscillant ou goutte-à-goutte, qui permet une diffusion lente et homogène.
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Surveiller la météo : après un orage, inutile de repasser trop vite.
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Éviter de tondre avant un arrosage, pour laisser l’ombre des brins protéger la terre nue.
Tonte et hauteur : un équilibre subtil
Quand le sol est sec et le soleil brûlant, nous laissons la tondeuse au repos plus longtemps. Une pelouse haute, entre 7 et 9 cm, ombrage mieux le sol et limite l’évaporation. Elle développe aussi un système racinaire plus profond, plus résilient. Les tontes trop fréquentes affaiblissent l’herbe et l’exposent davantage à la chaleur.
Nous adoptons une règle simple : jamais plus d’un tiers de la hauteur à la fois. Et plutôt que de ramasser les déchets de tonte, nous les laissons sur place. Ce paillage naturel nourrit le sol en matière organique et crée une fine couche protectrice contre le dessèchement.
Entretenir sans gaspiller : gestes malins
Il existe tout un éventail de petites habitudes qui, mises bout à bout, changent la donne. Rien de spectaculaire, juste une attention régulière et des gestes précis.
Parmi ceux qui font vraiment la différence :
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Affûter les lames de la tondeuse pour une coupe nette, qui n’abîme pas les brins.
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Ne pas piétiner les zones fragilisées, surtout en fin de journée quand la terre est chaude.
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Aérer le sol au printemps et en automne, à l’aide d’un scarificateur ou d’une fourche, pour favoriser la pénétration de l’eau.
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Semer du trèfle blanc nain ou d’autres couvre-sols résilients qui restent verts plus longtemps et fixent l’azote.
Faut-il renoncer à une pelouse verte en été ?
C’est une question que nous nous posons chaque année, lorsque juillet arrive et que les nappes phréatiques commencent à baisser. Dans le sud, il faut parfois accepter une herbe rousse en surface. Ce n’est pas toujours synonyme de mort : de nombreuses graminées entrent en dormance et repartent avec les premières pluies de septembre.
À ceux qui rêvent d’un jardin vivant toute l’année sans arrosage, nous conseillons de diversifier les espaces : mélanger pelouse rustique, paillis minéral, massifs de vivaces méditerranéennes et zones enherbées peu tondues. Cela crée un équilibre plus durable et moins exigeant.
La sécheresse nous oblige à revoir nos gestes, mais aussi notre regard. Ce n’est pas un combat contre la nature, c’est une danse avec elle. Une pelouse qui jaunit n’est pas un échec, c’est un signal. En l’écoutant, nous apprenons à jardiner autrement, avec plus de patience, plus de respect. Essayons, dès cette semaine, de ne pas tondre pendant quinze jours, et observons. C’est parfois dans ces silences que le jardin nous parle le mieux.